Pour ma part je redis ce que j'ai toujours pensé de "Load", c'est un très bon disque. Les Metallica avaient fait un break de plus de 4 ans (excepté les tournées) et chaque membre du groupe s'était un peu essayé à diverses choses. On sait que Ulrich appréciait beaucoup Oasis à l'époque, que Hetfield avait retrouvé ses racines blues/sudiste et que Hammett s'était essayé au jazz tout en écoutant des CDs de Lauryn Hill (cf interviews de l'époque).
Il était tout à fait normal que les gars aient envie de faire autre chose que du thrash métal. Avec l'âge, les goûts changent (il n'y a que les imbéciles...), et on s'assagit quelque peu. Donc le virage entamé sur ce disque n'était pas plus surprenant que ça quand on le replace dans le contexte.
Après reste à débattre de la qualité de l'album. La musique n'étant pas une science dure, on ne pourra pas affirmer qu'un album est bon ou pas. Les goûts de chacun, le moment où on l'écoute, etc...sont autant de critères permettant ou non d'apprécier un album.
Pour ma part j'ai beaucoup accroché à ce "Load" à l'époque pour plusieurs raisons :
- le son : la production de Bob Rock est génaiel pour l'époque. Je me souviens avoir été scotché par la lourdeur des guitares quand le CD avait été diffusé dans la cafèt' de mon lycée. Super mix, son très clair, lourd, mais à la fois roots, se prêtant bien à l'ambiance générale du disque.
- le style : exit le thrash, place à un métal/blues/roots original, empruntant autant à Lynyrd Skynyrd ("Ronnie"), à Corrosion of Conformity (la "couleur" du son) ou aux Beatles (un je ne sais quoi dans "Hero of the Day"). C'est vivant, c'est frais, tout en gardant une étiquette "américain authentique", comme si les Mets avaient pour la première fois revendiqué leur parcours musical, leur entourage culturel le plus lointain.
- les compos : plus varié que les précédents albums. Du rapide avec "Ain't my Bitch", "Wasting My Hate", du pesant avec "The Outlaw Torn" (j'adoooooore), du blues lourd et moderne avec "Bleeding Me", du rock métal efficace avec "2X4"), de la country avec "Mama Said", etc...Le groupe semble s'éclater à explorer de nouvelles voiues, dans des styles qui leur tiennent à coeur.
- la voix : Hetfield est devenu un véritable chanteur avec le Black Album ("Nothing Else" & co), mais c''est avec Load que les progrès se font le plus sentir. Désormais il utilise sa voix comme il l'entend, alternant chant puissant et mélodique sur n'importe quel type de compo. On le sent très à l'aise, se plaçant parfaitement sur chaque riff, sachant s'effacer au bon moment, bref une superbe prestation du chanteur des Mets.
- les soli : finies les descentes de manche stériles avec la wah wah à fond, place au feeling, place à l'économie, place à la justesse. Certains ont reproché à Hammett de s'être reposé sur ce disque, alors c'est vrai qu'il n'y a pas d'exploit technique, pas de tapping, rien qui puisse nous faire sauter de notre chaise pour faire un rembobinage arrière et reécouter la prouesse guitaristique. Mais sur "Load", chaque intervention de Hammett est judicieuse. Et ça suffit.
- des passages de folie : honnêtement, certains riffs de ce disque me retournent plus que ceux de "Master of Puppets". Je vois les puristes qui s'étranglent déjà, mais par exemple sur "Bleeding Me", le riff qui relance la chanson en plein milieu, c'est une tuerie comme rarement j'en ai entendue. Pas rapide, pas violent, mais quelle lourdeur, quelle puissance, on se croirait revenus à la grande époque de Black Sabbath ! Ce genre de petits détails font la différence pour moi, avec "Reload" ou rien ne décolle vraiment.
- le contexte : en 96 quand je découvre ce disque, je ne connais Metallica que par le Black Album que j'ai découvert récemment. Je ne peux pas être déçu par ce virage mélodique puisque le Black semblait annoncer une telle orientation ("Unforgiven", les tempos ralentis, etc...). A cette époque un de mes albums préférés est le "Youthanasia" de Megadeth, où on retrouve le même gros son, le même type d'ambiances pesantes, même si c'est beaucoup plus thrash et moins roots dans l'esprit. "Load" peut dès lors s'installer facilement dans ma liste de bons albums. Pour autant je ne l'achète pas immédiatement, préférant à l'époque consacrer mon maigre budget de lycéen à l'achat des derniers Maiden qu'il me manque. Ce n'est que quelques mois plus tard que je me déciderai à acheter ce disque. En voyage aux USA avec mes parents on va bouffer au Hard Rock Café de San Francisco où en plus de voir la gratte à Hetfield dédicacée, j'ai la chance d'écouter "Load" à fond en dévorant un énorme hamburger (à l'époque le rapport qualité/prix était encore intéressant dans les HRC). Et le fait de se trouver dans leur ville, d'être dans l'euphorie du voyage, etc...cet album devient tout d'un coup ma priorité d'achat. Comme j'ai déjà acheté plusieurs CDs à SF (Lynyrd que je découvre, les Guns ou Aerosmith : Nine Lives qui vient de sortir), je me dis que je l'achèterai à mon retour en France.
Deux mois plus tard j'ai enfin mon "Load" dans les mains, et à son écoute, les images du voyage me reviennent inlassablement.
Voilà toutes les raisons qui font que j'aime énormément ce disque.
PS: c'est d'ailleurs au cours de ce voyage aux States que "Flyind in a blue Dream" est devenu mon Satriani préféré. J'avais amené ma vieille cassette et on la écoutée du côté de Sausalito (chez Satch, Hammett ou Santana...) ainsi que sur les longues routes de l'ouest américain. Je vous dis pas l'effet d'une chanson comme "Flying in a Blue Dream" quand vous êtes dans le désert, paumé au beau milieu d'un décor de western, avec un ciel sans aucun nuage à des kilomètres à la ronde.
