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Claude Debussy - Prélude à l'après midi d'un faune
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SIGSEGV
Prêtre de Judas
Inscription: 19 Avr 2004 16:28 Messages: 710 Localisation: Rueil-Malmaison
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 Claude Debussy - Prélude à l'après midi d'un faune
Après avoir beaucoup ri en lisant les énormités du topic sur la comparaison Malmsteen/Romeo/Smolski, j'ai décidé de parler musique (ça risque de faire bizarre à certains ici).
En pensant aux révolutions musicales, on y réfère généralement en terme de sonorité et de provocation: les dissonances et la puissance de Beethoven, la rage de Stravinsky dans le Sacre du printemps, la décadence consommée de Schoenberg dans Pierrot lunaire. Encore est-il que la plus radicale de toutes les voix musicales fut celle langoureuse et sous-estimée de Claude Debussy. Tous les révolutionnaires ont infléchi ceci ou développé cela et rejeté telle autre chose; Debussy a tout renié et d'un seul coup: la syntaxe harmonique traditionnelle, le rythme à quatre temps, la mélodie romantique, les formes classiques, les orchestrations pompeuses. Toutefois, à travers son œuvre, on peut discerner les influences allant de Couperin à Wagner et Musorgsky ainsi qu'au gamelan javanais. Il ne ressemble à aucun musicien qui l'a précédé. En même temps, à nos oreilles, il nous est familier; l'extraordinaire synthèse de son style nous apparaît si naturelle qu'il est difficile de croire que personne n'y avait pensé avant lui. Son influence sur toute la musique occidentale - classique, jazz et populaire - a été déterminante.
Alors qu'il remportait des prix et des médailles, il confondait ses professeurs avec ses idées. Les anecdotes à propos des idées et du comportement de Debussy devinrent légendaires au Conservatoire. Ainsi, durant une classe d'improvisation au piano, César Frank lui criait "Modulez! Modulez!" et Debussy de lui répondre calmement "Pourquoi? Je suis parfaitement heureux où je suis". Quand Giraud, son professeur de composition, lui dit "Je ne dis pas que ce que vous faites n'est pas joli, seulement que c'est théoriquement absurde" et Debussy de lui répondre "Il n'existe pas de théorie. Vous n'avez qu'à écouter. Le plaisir est la loi." Néanmoins, il passa plusieurs années à soumettre, de façon intermittente, des travaux traditionnels en harmonie et contrepoint dans le but d'obtenir l'honneur le plus prestigieux du Conservatoire, le Prix de Rome. Déjà son approche du rythme est totalement atypique, la richesse mélodique est exceptionnelle, il y a plus de 100 ans, il introduisait les modes pentatoniques et les gammes par tons, s'échappant régulièrement de la musique tonale de base. Sa musique est fondée sur les éléments de la tonalité (accords majeurs/mineures, mélodies diatoniques, chromatismes), mais le temps est comme suspendu et s'il reste une tonique, il n'y a plus de rapport dominante/tonique si caractéristique de la musique tonale. Debussy, c'est magnifique de A à Z, c'est la musique la plus éthérée de l'univers, d'une subtilité constante, qui réalise à elle seule le paradoxe de la musique parce qu'elle n'est "rien", toujours évanescente, et pourtant d'une profondeur incroyable; une musique pure, toujours en mouvement, qui n'est que mouvement, abstraite et hors du temps...
Contemporain d'Erik Satie (celui qui chiait dans son piano), Ernest Chausson et ami d'Igor Stravinsky, Debussy, c'est l'impressioniste de la musique, sa musique ne ressemble à rien de ce qui a été fait avant, et personne ne l'a copié car son approche de la musique est totalement atypique. Sa musique est semblable à une intrusion dans un monde de rêve. Le langage des sons a été rendu soudainement riche et étrange; les grands orchestres romantiques sont maintenant devenus légers et délicats. Chaque instrument semble fait de visions et de suggestions: une flûte devient la mémoire d'une caresse, une cymbale devient une fraîche écume de mer. Lorsque l'on compare les orchestrations lumineuses de Debussy à celles de Wagner et Brahms, ces dernières semblent turgides et opaques; et lorsqu'on compare le parfum intoxiquant de ses harmonies celles-ci rendent presque puritains les innovateurs du 20è siècle. C'est avec la flûte du faune que commence une respiration nouvelle de l'art musical, non pas tellement l'art du développement musical que sa liberté formelle, son expression et sa technique. L'emploi des timbres y est essentiellement nouveau, d'une délicatesse et d'une sûreté de touche tout à fait exceptionnelles; l'emploi de certains instruments comme la flûte, le cor ou la harpe, y est caractéristique de la manière dont Debussy les employa dans ses oeuvres les plus tardives ; les bois et les cuivres y trouvent une légèreté de main et une sûreté d'emploi telles que l'on se trouve en présence d'un miracle d'équilibre et de clarté sonore. Cette partition possède un pouvoir de jeunesse qui n'est pas encore épuisé, et, de même que la poésie moderne prend sûrement racine dans certains poèmes de Baudelaire, on peut dire que la musique moderne commence avec L'Après-midi d'un Faune. Tout cela est rendu concrètement par une oeuvre d'une dizaine de minutes en 9/8 ou toute la mélodie et l'harmonie navigue en dehors de la mesure sans jamais faire ressortir de rythme clairement défini (contrairement à ce que se faisait avant, écoutez Bach ou Mozart, vous trouverez le tempo immédiatement, pour le prélude à l'après midi d'un faune, accrochez vous). Et ainsi, la mélodie vous pénètre, sans plus vous quitter pour la journée.
Debussy est le créateur de la musique moderne et initiateur de la musique atonale (même si la sienne ne l'est pas), et probablement le dernier grand compositeur qui soit resté dans l'Histoire de la musique avec Stravinsky. Interessez vous à lui, ça en vaut la peine.
_________________ Il existe 2 styles de musique, la bonne et la mauvaise - Beethoven
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19 Juil 2005 6:28 |
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ZiGGy
Skeleton In The Forum
Inscription: 15 Mar 2004 23:51 Messages: 5370 Localisation: Saint Ganton
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Comment différencier un fan basique d'un critique correcte ? Le critique n'a pas besoin de dire que les autres sont moins bons pour se justifier de l'éloge d'un artiste.
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19 Juil 2005 7:32 |
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SIGSEGV
Prêtre de Judas
Inscription: 19 Avr 2004 16:28 Messages: 710 Localisation: Rueil-Malmaison
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je n'ai pourtant comparé personne 
_________________ Il existe 2 styles de musique, la bonne et la mauvaise - Beethoven
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19 Juil 2005 8:46 |
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noise
Ce mec a floodé, je l'ai vu !
Inscription: 14 Mar 2004 20:49 Messages: 25655 Localisation: Cambrai
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Il est poil prétentieux ton topic Sig non? 
_________________ It's the nexus of the crisis and the origin of storms
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19 Juil 2005 10:41 |
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Chipstouille
Long Distance Runner
Inscription: 20 Avr 2004 10:27 Messages: 3529 Localisation: Paris
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C'est sympa de nous dire tout ça, mais honnètement, j'ai rien compris à ton deuxième paragraphe
Et pourtant j'ai 4 années de solfège (loin) derrière moi...
Alors pour pas mourir con:
-qu'est ce que tu appelles exactement une atonalité? (ça perso je sais, mais je suis pas sûr que ce soit le cas de tout le monde...)
- Qu'est ce qu'a de particulier une mesure en 9/8 en dehors de la partition en elle-même qui est pas écrite de la même manière, à l'oreille ça donne quoi.
- C'est quoi les modes pentatoniques?
- C'est quoi la gamme par ton? (ya des gammes qui ne sont pas par ton?)
- Il fait pas d'atonalités, mais il fait pas de musique "tonale de base" non plus, tu m'expliques?
- En fait explique moi tous les mots de cette phrase aussi:
SIGSEGV a écrit: Sa musique est fondée sur les éléments de la tonalité (accords majeurs/mineures, mélodies diatoniques, chromatismes), mais le temps est comme suspendu et s'il reste une tonique, il n'y a plus de rapport dominante/tonique si caractéristique de la musique tonale
Et enfin, je demande quand même parce que pour le coup je suis pas sûr, pour Erik Satie, c'est du premier ou du second degré?
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19 Juil 2005 11:20 |
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SIGSEGV
Prêtre de Judas
Inscription: 19 Avr 2004 16:28 Messages: 710 Localisation: Rueil-Malmaison
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je vais prendre dans l'ordre
alors, grosso modo, une musique atonale est une musique qui ne se trouve pas dans une tonalité définie. Dans les musiques tonales, en do majeur, le do (la tonique) ne joue pas le même role que le ré qui ne joue pas le même rôle que le mi etc... En do majeur, les notes les plus importantes sont le Do (tonique) et le Sol (dominante). En gros, il y a toujours un "rapport" entre la dominante et la tonique dans la mélodie. Debussy s'affranchit de ça. pour l'époque, c'est du jamais entendu
Une musique atonale est une musique dans laquelle chaque note joue le même rôle que les 11 autres de l'octave. Une partie de la musique contemporaine se base là dessus (musique serielle à la Boulez). Donc la notion de dominante, tonique, sensible etc... n'existe plus
Pour la mesure en 9/8, c'est une mesure à trois temps ternaires, en gros, tu comptes 1/2/3 - 4/5/6 - 7/8/9. En général c'est utilisé pour donner un coté dansant (imagine une valse, tu comptes le 1/2/3 des pas des danseurs) et fortement rythmé. Là, Debussy fait le contraire, sur une signature rythmique très nette à la base, il fait "naviguer" son morceau en dehors du temps. C'est inoui.
Pour les pentas, je passe les détails, c'est une gamme qui subdivise l'octave avec 5 notes en progressant par quintes, exemple : do ré mi sol la (plus do pour compléter l'octave), ça fait une penta. On caricature en disant que ce sont les gammes des rockeurs et bluesmen, mais c'est ultra réducteur de dire ça puisqu'on trouve ce genre de gammes depuis des centaines d'années voire des milliers d'années dans diverses parties du monde (d'où le nom "gamme chinoise" aussi). l'utilisation de ce genre de gammes est inexistante dans la musique occidentale dite classique, jusqu'à ce que Debussy débarque avec son piano.
La gamme par tons c'est une gamme qui progresse par tons entiers  exemple : do - ré - mi - fa# - sol# - la# - do. C'est Debussy qui a vraiment introduit ça
Pour Satie, c'est du premier degré, après sa mort, on a retrouvé des étrons dans son piano
J'espère n'avoir rien oublié 
_________________ Il existe 2 styles de musique, la bonne et la mauvaise - Beethoven
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19 Juil 2005 11:58 |
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Chipstouille
Long Distance Runner
Inscription: 20 Avr 2004 10:27 Messages: 3529 Localisation: Paris
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Moi ça me tue que ce genre de trucs paraissent être une révolution, alors que je suis à peu près persuadé qu'au moyen age et avant, ya des mecs qui ont suremnet du composer des trucs au pif en gratouillant sur leur vielle et se sont rendu compte que ça donnait un truc neuf pas trop dégueu...
Déjà les écarts de tons et demi-tons en musique, c'est une règle à la con.
Enfin présenté comme tu nous l'a fait, ça donne l'impression que le mec s'est vachement pris la tête, alors qu'au final il a juste évité de placer ses doigts aux mêmes endroits que d' "habitude" sur son piano  en s'imposant de nouveau des règles, mais différentes cette fois-ci.
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19 Juil 2005 14:09 |
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ZiGGy
Skeleton In The Forum
Inscription: 15 Mar 2004 23:51 Messages: 5370 Localisation: Saint Ganton
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Sigsev: 1959, Giant Steps, tu nous la refais ? 
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19 Juil 2005 17:56 |
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SML66
Heavy Metal Lawyer
Inscription: 14 Mar 2004 13:10 Messages: 1194 Localisation: Dunkerque
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SIGSEGV a écrit: J'espère n'avoir rien oublié 
Si, que la musique ça s'écoute  !
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19 Juil 2005 18:36 |
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