
Mercyful Fate-Melissa (1983) et Don't Break the Oath (1984)
Bon, je vois que personne ici n'a fait de chronique de ces deux albums cultes du plus dark des groupes de 80es, j'ai nommé Mercyful Fate. Au départ, Mercyful Fate est un groupe danois de heavy metal fondé par le chanteur King Diamond, alias Kim Bendrix Petersen, chanteur à la voix très particulière et versatile, adepte des prestations scéniques théâtrales et outrancières, et les deux fins bretteurs Hank Shermann et Michael Denner. Après un premier EP 4 titres eponyme en 1982, le groupe sort l'album Melissa en 1983, puis don't break the Oath en 1984, deux albums cultes et référentiels qui ont influencé des générations de blackmetalleux.
Comment définir la musique jouée par Mercyful Fate sur ces deux albums? Le groupe joue un heavy metal assez élaboré, riche en breaks, en changements de rythmes, en arrangements, survolé par la voix théâtrale et possédée de King Diamond, passant en un clin d'oeil d'un timbre heavy traditionnel à une voix suraigue cristalline. Riffs agressifs, breaks lugubres, clavecins fantomatiques, voix schyzophrène et possédée de King Diamond, tous ces éléments sont au service d'une musique sombre, inquiétante et théâtrale, à l'ambiance gothique et ténébreuse, qui influencera toute la future scène black metal.
Pour autant, Mercyful Fate n'oublie pas d'être un vrai groupe de heavy metal, puissant, intense et mélodique. La musique du groupe est extrèmement élaborée, soignée, les musiciens sont de véritables virtuoses, notamment les deux gratteux Shermann et Denner, qui rivalisent de feeling et d'inventivité en riff comme en solo. Surtout, Mercyful Fate reste mélodique. Bon, on est loin de Manowar et de ses refrains de folie, mais les mélodies sont bien présentes. Pas forcément évidentes à la première écoute, ces mélodies arrivent petit à petit à se frayer insidieusement un chemin dans le cortex, au point d'en devenir obsédantes. Et on se laisse transporter par ces riffs d'outre-tombe, à la fois sombres et accrocheurs, ces vocaux morbides et enjôleurs à la fois. C'est tout le pardoxe du groupe, en fait : produire une musique à la fois sombre, morbide, et en même temps extrèmement accrocheuse et entraînante, comme une sorte de danse macabre dans laquelle on se sentirait inexplicablement entrainé. Un morceau comme Gypsy est à ce titre très révélateur : les paroles sont morbides, le chant possédé, et en même temps le riff est ultra-accrocheur, le rythme entraînant, presque dansant, pour un morceau particulièrement hypnotique et obsédant.
Sur l'album Melissa, le groupe montre tout son talent sur des morceaux comme Evil, Curse of the Pharaoh et Into the Coven : ces morceaux, bien qu'élaborés et riches en breaks, restent assez concis et sont construits autours de riffs et de mélodies simples. Sur ces morceaux, Mercyful Fate nous expose son sens du riff qui tue, du tempo qui arrache, de la mélodie à chialer, du break à tomber... Et que dire de Melissa, sorte semi-ballade sombre, prenante, obsédante. Un petit bijou. Et puis il y a le gros morceau, Satan's Fall, longue pièce "progressive" et à ambiance. Personnellement, je n'accroche pas trop à ce morceau, qui me semble assez décousu, sans moments réellement accrocheurs.
L'année suivante, le groupe revient avec Don't Break the Oath, dans la continuité de Melissa, en plus élaboré, plus riche et mieux produit. Le groupe réussit une nouvelle fois le difficile équilibre entre atmosphères flippantes et mélodies fortes, sur des morceaux comme a Dangerous Meeting, Desecrations of Souls, Night of the Unborn ou Come to the Sabbath. Un morceau comme Nightmare, qui peut sembler quelque peu décousu, se révèle également convaincant, accrocheur et flippant. Le groupe réussit cette fois à créer une longue pièce à ambiance, avec the Oath, qui est un veritable festival de la part des guitarsites, qui, au cours de ces 7 minutes 30 nous montrent leur science de la mélodie et leur feeling, à coup de riffs éfrennés et de solos à tomber. Et que dire de Gypsy, on pourrait écrire des romans sur ce riff accrocheur comme du velcro, ce rythme ultra-headbanguant et quasi-dansant, ce chant possédé, ces interventions guitaristiques superbes de feeling.
En bref, Mercyful Fate est evil, Mercyful Fate est sombre, Mercyful Fate est morbide. Mais il ne faut pas oublier que, outre ce statut de précurseur du black metal, Mercyful Fate est quand même un putain de bon groupe de heavy metal.