Suivant la régularité d’un métronome, Rage sort un nouvel album studio moins de deux ans après End of all days. Et fort de son expérience avec le Lingua Mortis Orchestra sur l’album live sorti en 1996, Rage franchit le pas et crée un album complet avec cet orchestre. Chaque chanson intégrant des éléments orchestraux. Si l’expérience a déjà été tentée par des groupes de rock, tel Deep Purple en 1968, c’est l’une des premières fois qu’un groupe de Heavy Métal crée de cette manière et ne se contente pas de réorchestrer ses anciennes chansons, ceci sera d’ailleurs très à la mode, Metallica ou Scorpions le faisant peu de temps après. De fait si on pouvait craindre le pire, l’exercice apparaissant très périlleux, le mariage entre classique et heavy métal pouvant apparaître à certains contre nature, l’exercice est ici très réussi et dépasse toutes les espérances. L’album démarre avec Overture composé de main de maître par Christian Wolf, qui fait vraiment office de 5ème membre du groupe, celui-ci est responsable des orchestrations et il co-produit le disque. Cette introduction donne le ton, elle est réellement magnifique et le morceau qui enchaîne, From the cradle to the grave, est un petit bijou de mélodie doté d’un refrain très immédiat, Peavy Wagner s’y montre magistral et la symbiose entre le groupe et l’orchestre est immédiateLa mue du groupe, commencée depuis The Missing Link, est ainsi achevée. Le passé thrash est loin et le groupe propose des morceaux remplis d’émotions et de finesse. La trilogie Changes (Sign of heaven, Incomplete, Turn the page) est un réel moment de bravoure, Sign of heaven entame les choses de manière assez puissante, tandis que Incomplete s’avère être une ballade magnifique, l’orchestre accomplissant un travail encore remarquable, Turn the page est plus mi-tempo mais tout aussi réussie. Dans le même registre émotionnel, on retiendra aussi In vain qui est le morceau phare de l’album, même si celui-ci ne comporte aucun temps mort, défaut de ses prédécesseurs. Ce titre, qui est le single de l’album, est un véritable hymne, son refrain est aisément mémorisable et le travail orchestral est encore splendide, celui-ci complète formidablement le travail des musiciens du groupe. Mais l’album comporte aussi des titres plus puissants, Heartblood est complètement heavy et rappelle le passé du groupe avec un léger côté thrash que l’orchestre n’affaiblit absolument pas. Immortal sin donne aussi envie de hedbanguer tout en étant plus mélodique. Cet album comporte aussi une reprise de Pain it, Black des Rolling Stones, et cette reprise s’intègre magnifiquement au reste du disque. Ce morceau, un des grands titres des Stones, est transformé et est une réussite indéniable, un vrai travail de réécriture passionnant. On tient donc là l’un des meilleurs albums de Rage, si ce n’est le meilleur, le groupe est au sommet de son art et il nous propose une musique d’une rare richesse, le tout nous présente une oeuvre réellement passionnante car innovante, ce qui est une qualité devenue rare dans le heavy moderne. C’est assurément un disque majeur des années 90 en heavy mélodique.
