Retour en 1994, Queensrÿche est déjà depuis presque 10 ans un grand nom de la scène métallique internationale grâce à des albums comme Rage for order (1986), Operation Mindcrime (1988) ou Empire (1990).
Avec ces trois albums, le groupe a donc su non seulement se faire un nom mais a aussi quasiment créer un genre musical à part entière.
Car en partant de son heavy métal de base, très influencé par Iron Maiden, il a su s’ouvrir à des influences progressives dès Rage for order, apportant à sa musique une identité très forte avec un univers assez sombre et beaucoup de richesses dans les arrangements.
Après un tel trio d’albums, le groupe a pris le temps de souffler afin de mieux aborder les années 90, et la réalisation de son nouvel album va pratiquement lui prendre deux ans, l’écriture se partageant quasi complètement entre Geoff Tate et Chris DeGarmo.
Mais un grand vent de changement est parallèlement en train de souffler sur le heavy métal, et ce vent vient précisément de la ville d’origine de Queensrÿche, Seattle.
Le grunge, avec Nirvana et Pearl Jam en tête a en effet pris son envol et il a commencé a balayer pas mal de groupes de hard et de heavy des années 80.
Ainsi quand le groupe sort de plus de deux ans de silence après la fin de la tournée Empire, tout a radicalement changé et la pression est assez forte sur Queensrÿche qui est un symbole assez fort de la scène heavy métal classique
En effet depuis 1991-1992, cette scène classique peine à trouver son souffler et cette année 1994 s’avère être une des plus pauvres pour les fans de heavy métal et de métal progressif, le Awake de Dream Theater étant la seule exception notable.
Mais tout ceci n’entame en rien la volonté créatrice du groupe qui va poursuivre son chemin sans se mêler du tout des effets de mode.
Car si Queensrÿche nous propose encore une fois un concept album, ce dernier va s’avérer être radicalement différent d’un Operation Mindcrime assez grandiloquent et musicalement très éloigné de Empire, qui montrait une face assez accessible, presque FM.
Prenant tout le monde à contre-pied, Queensrÿche prend avec Promised Land une voie novatrice pour lui, d’une rare richesse, montrant des faces musicales très variées dans un ensemble d’une très belle cohérence.
Promised Land va complètement surprendre les fans du groupe, ces derniers s’attendait à voir le groupe garder la même ligne à mi-chemin entre ses deux précédents albums.
Car on est bien loin des clichés métal dans ce concept album qui tourne autour de la mort, de la réincarnation et de la recherche de soi dans une atmosphère très mélancolique et acoustique.
Le groupe a ainsi choisi de se réinventer plutôt que de risquer de stagner artistiquement et aussi et surtout de chercher à se retrouver après une tournée Empire qui avait vu le groupe devenir commercialement énorme.
Promised Land apparaît ainsi presque comme une thérapie que les membres se seraient offerts pour mieux sortir des effets de la gloire et du rock system.
Le ton général de l’album est donc assez intimiste, les envolées heavy se font rare pour laisser place à des ambiances que Pink Floyd n’aurait pas reniées et aussi à des passages plus hard rock mais sans jamais délaisser un aspect posé du meilleur effet.
Et ce Promised Land se découvre donc lentement comme un livre que l’on dévore doucement, il s’apprivoise au fur et à mesure des écoutes.
Et avec le recul, on se dit que sortir un tel disque en 1994 était un pari très risqué, voir même complètement fou vu l’atmosphère musicale de l’époque, plus en phase avec des disques assez immédiats.
Mais même plus de 14 ans après, on se prend toujours au jeu à l’écoute comme lors de la première fois, le plaisir reste entier et intact, preuve de la grande vision qu’avait eu le groupe en proposant ce disque.
Promised Land arrive à ne pas lasser en gardant encore et toujours une entière part de mystère à l’image de sa magnifique pochette dépliante proposant un totem majestueux à l’image de l’emblème du groupe qui donne un aspect quasi mystique à la chose.
Comme dans tout bon concept album qui se respecte, on aborde le disque par une courte introduction, 9.28 AM, comme pour mieux se plonger dans l’histoire.
Puis avec I am I, on retrouve le seul titre de l’album qui peut évoquer le Queensrÿche classique. Le titre qui est aussi le premier single est bâti sur un riff assez heavy, typique de l’esprit du groupe, comme pour rassurer les fans au début de l’écoute, le tout avec un refrain où Tate montre une belle puissance, le I am I étant martelé comme pour clairement montrer que le groupe veux se réapproprier son identité.
Mais même sur ce titre d’apparence classique, on trouve déjà quelques percussions discrètes et quelques parties de cithare superbement jouées par Chris DeGarmo.
Avec Damaged, on trouve un titre encore assez heavy mais plutôt rock dans l’esprit et très entraînante dans un esprit qui rappelle un peu Empire.
En fait le voyage musical commence réellement avec Out of mind qui comme son nom l’indique un peu nous fait sortir
En trois titres, Out of mind, Bridge et Promised Land, Queensrÿche ouvre son âme et s’ouvre à de nouveaux horizons tout en nuance et en mélodie.
Out of mind et ses passages à la guitare très aériens, l’âme d’un Pink Floyd est très présente, nous plongent comme en plein rêve, faisant voyager l’auditeur loin, très loin.
Bridge avec sa large facette acoustique est ensuite une pure merveille d’émotion brute, dans laquelle Chris DeGarmo évoque son père avec une justesse et une délicatesse très prenante, de plus Geoff Tate rend à merveille la subtilité du titre au chant.
Le titre éponyme du disque est le sommet du disque, sur plus de 8 minutes, Queensrÿche se transcende complètement et balance un grand titre, tour à tour progressif, planant et surtout envoûtant grâce à des passages musicaux sublimes et subtiles, Tate jouant du saxophone sur le titre avec une classe énorme dans une ambiance piano bar digne encore une fois du meilleur Pink Floyd.
La deuxième partie de l’album débute avec un Disconnected où le saxophone est encore présent, le titre est un des moins évidents de l’album, encore assez nuancé mais jazzy dans l’âme. Puis avec Lady Jane, on trouve une très belle ballade un peu heavy soutenu par une belle partie de piano et un excellent refrain.
Le final de l’album retrouve des aspects plus heavy rock avec My global mind et One more time, mais sans jamais perdre le côté mélodique et planant, notamment sur les soli. De plus la guitare acoustique de One more time apporte un côté dramatique, parfaitement mêlé à des passages plus heavy du meilleur effet.
Someone else clôt ensuite le disque tout en émotion et en douceur, avec uniquement Tate au chant et DeGarmo au piano. Et le titre est une pure merveille de finesse musicale idéale pour conclure l’album.
Promised Land est donc un chef d’œuvre d’un bout à l’autre. Il reste à ce jour le dernier grand disque du groupe et sans doute aussi l’un de ses tout meilleurs et en tout cas le plus aventureux, prouvant toute l’intelligence d’un groupe hors norme.
Mais malheureusement depuis ce sommet, Queensrÿche a du mal à retrouver la même verve, le relatif échec commercial subit par Promised Land n’y étant sans doute pas étranger.
Mais même si le groupe ne retrouve jamais ce niveau, on pourra se consoler en écoutant
En épilogue, on précisera que le disque a été réédité en 2003 avec des titres en bonus, dont une version de Someone Else avec le groupe au complet, mais qui n’a pas la force de la version originale et un inédit, Real World, issu de la bande son de Last Action Hero. Et rien que pour ce titre l’achat du remaster s’impose comme une évidence, Real world est en effet une splendide ballade acoustique porté par un Geoff Tate encore une fois énorme au chant et une fin symphonique superbe.
Je met rarement 10 a un disque, mais celui la les a sans soucis
1. "9:28 a.m." (Scott Rockenfield) – 1:43
2. "I Am I" (Chris DeGarmo, Geoff Tate) – 3:56
3. "Damaged" (DeGarmo, Tate) – 3:55
4. "Out of Mind" (DeGarmo) – 4:34
5. "Bridge" (DeGarmo) – 3:27
6. "Promised Land" (DeGarmo, Eddie Jackson, Rockenfield, Tate, Michael Wilton) – 8:25
7. "Disconnected" (Rockenfield, Tate) – 4:48
8. "Lady Jane" (DeGarmo) – 4:23
9. "My Global Mind" (DeGarmo, Rockenfield, Tate, Wilton) – 4:20
10. "One More Time" (DeGarmo, Tate) – 4:17
11. "Someone Else?" (DeGarmo, Tate) – 4:38
12. "Real World" [From Last Action Hero Soundtrack] - 4:23
13. "Someone Else?" [Full Band] - 7:13
14. "Damaged" [Live] - 4:00
15. "Real World" [Live] - 3:45
Et sinon ça reste un brouillon, faut que j'élague, que je retape un peu le tout, on va voir ça peinard, mais j'avais envie de faire partager tout ça