Il y aurait beaucoup à écrire sur les pochettes du Priest. Elles donnent souvent un avant-goût assez exact de l’album qu’elles enveloppent. Celle de Sin After Sin rend parfaitement compte de l’atmosphère ésotérique et sophistiquée du disque. Quand on mate celle de British Steel, on se doute bien que l’on ne va pas écouter de la pop enjouée. Cette main serrant une lame de rasoir est l’une des images les plus fortes de l’histoire du rock.
Quant à la pochette de Killing Machine, elle m’a toujours impressionné. Elle dégage une menace presque palpable. Il ne s’agit pourtant que d’un mannequin affublé des accessoires chers à Rob mais les lueurs rouges qui illuminent les lunettes sont des plus inquiétantes. The Red&The Black, comme l’avait si bien résumé le Blue Öyster Cult… Lorsque je contemple cette image, je pense toujours aux fameux Cybernautes de la série Chapeau Melon et Bottes de Cuir, terribles robots indestructibles. Cela semble annoncer un heavy metal pur et dur, sans concessions.
Delivering The Goods confirme cette première impression, hymne instantané et immédiat, caractérisé par une véritable urgence. Poussée d’adrénaline. La voix de Rob semble lutter contre les guitares, chaque parti semblant tirer dans la direction opposée. Tension. Refrain imparable, électrique ! Un solo impeccable, concis et éruptif, concentré de métal en fusion achève l’auditeur. Silence. C’est fini. On attend la suite avec impatience et non sans appréhension. Lorsque se fait entendre le début de Rock Forever, l’auditeur est forcément surpris. Voilà un rock entraînant mais plus calme, positif et agrémenté de chœurs pop. On est très loin de la violence de Delivering… Et l’on se pose des questions… Evening Star ne va pas arranger les choses : un début à la Last Rose Of Summer qui paraît annoncer une ambiance plus sombre… Pourtant le refrain est étrangement joyeux et positif. Les couplets suivants sont plus enlevés que l’intro. Il y a de mélodiques solos et l’on note le jeu subtil de Les Binks, remarquable batteur. A ce stade, on se dit que Killing Machine est un bien curieux recueil de chansons. Pour l’instant, on a eu droit à trois morceaux, tous radicalement différents les uns des autres. Du coup, l’attente initiale en a pris un sacré coup… Pour le heavy metal uniforme, on repassera… Mais ne nous trompons pas : il ne s’agit pas d’une déception, toutes ces compos étant intéressantes et réussies. Le biker tout de cuir vêtu que l’on imaginait vindicatif et brutal se révèle être un véritable gentleman, courtois et civil… Ce qui veut dire qu’à ce point de l’œuvre, on s’attend à tout. Le prochain titre sera-t-il disco (après tout, on est en 78 !) ? Progressivo-épique ? Une ballade irlandaise, alors ? Oui, on s’attend à tout sauf à ce déferlement barbare, cette horde sauvage qui déboule dans la pièce et dévaste tout. Hell Bent For Leather ou le Priest à son meilleur. Même délire que Delivering… Une intro purement heavy et qui influencera le Slayer des débuts… Voix inquiétante de Rob digne d’un psychopathe froid et déterminé à faire mal, chœurs robotiques. L’esprit de British Steel avant l’heure. Solo épatant et précis. Un classique qui n’a pas pris une ride. Le genre de compo qu’il faudrait faire écouter à tous les pisse-vinaigre qui débinent le metal.
Take On The World amène à nouveau un drastique changement de cap. Il s’agit du grand frère de United (sur British Steel). Une évidente tentative de créer un hymne à la We Will Rock You (sorti l’année d’avant), le genre de truc à être repris par les amateurs de foot. Une batterie très en avant et, au final, ça se laisse écouter. A cette époque, il est clair que Judas subissait parfois l’influence de Queen et il est vrai que les deux groupes avaient un certain nombre de points communs…
Mais j’interromps là ces considérations… L’intro trompeuse de Burnin’Up vient de retentir. Un riff syncopé et entêtant se fait entendre. Un bon morceau, pas le plus évident. Ce qui m’amène à redire :
-qu’il s’agit d’un disque extraordinairement varié (parfois au détriment de la cohérence de l’ensemble).
-que Les Binks est un batteur injustement oublié (le remaster rend vraiment justice à son jeu).
-le chant de Rob est d’une grande diversité, loin de la caricature simpliste du screamingMetalGodfor vengeance.
Le retour final du riff initial m’arrache à ces pensées. C’est alors que résonne un autre riff, absolument irrésistible. The Green Manalishi, une reprise de Fleetwood Mac. Pas du Mac période Stevie Nicks. Le Mac du début des années 70, avec le déjanté Peter Green, justement. Le lien qui se trouve plus bas explique l’histoire de cette chanson.
Cette interprétation est magique, le Priest s’accaparant totalement The Green Manalishi. Très bonne version studio que le groupe rendra encore plus démente sur scène, avec un Rob chantant la partie finale, initialement jouée à la guitare.
Le reste du disque est constitué d’un hard rock moins surprenant.
Après The Green Manalishi, le morceau-titre paraît moins fort, évidemment. Ce n’est pas vraiment un classique mais il est très bon, avec son ambiance glauque et Rob qui interprète cette fois un impitoyable tueur à gages qui a un contrat à remplir.
Running Wild débute par un riff simple et entraînant. Les couplets sont accrocheurs. Une guitare lead se superpose intelligemment au reste. Il y a aussi par moments des parties de guitare hachées et remuantes que l’on retrouve à la fin. Une excellente composition, pleine de bonnes idées, et qui gagnerait à être plus connue.
Evil fantasies : un riff sympa pour un morceau pas franchement transcendant. Sans doute le point faible du disque. Pourquoi l’avoir placé en dernière position ? Pourquoi finir sur une note moins positive ? Par moments, je pense au Pain And Pleasure de Screaming…Les gars, évitez de nous raconter vos fantasmes, ce n’est pas dans cet exercice que vous excellez… Bon, le crescendo final remonte le niveau.
La surprise, c’est l’avant-dernière chanson, Before The Dawn, charmante ballade inattendue, avec de la guitare accoustique et un Rob bucolique. Que cet album est varié ! On remarque le solo un peu emphatique. On se dit que c’est joliment envoyé mais Before… n’a rien à voir avec le reste du disque et de la face B. Aussi agréable soit-il, ce bel exercice de style ne nous mène nulle part.

En conclusion, Killing Machine permet au groupe de clore dignement les années 70. La caractéristique du Priest cuvée 78, c’est qu’il a un pied dans la décennie en cours, un autre dans la suivante dont il a su anticiper certaines tendances (efficacité, concision).
Si Sin After Sin était un album très seventies, Stained Class sonnait très moderne, bien plus, paradoxalement, que son successeur.
Si Before The Dawn et Evening Star paraîtraient déplacés sur un album des années 80, Delivering The Goods, Hell Bent For Leather et dans une moindre mesure Burnin’Up et Running Wild auraient pu figurer sans problème sur un disque de la période 80/82.
On ne retrouvera pas une telle diversité sur l’excellent British Steel, exclusivement constitué d’hymnes martiaux.
Ce Killing Machine à la pochette quelque peu trompeuse marque donc bien la fin d’un pan essentiel de la carrière de Judas Priest.



http://en.wikipedia.org/wiki/The_Green_Manalishi

J'adore ce disque, pas prise de tête, varié, tubesque, assez direct, aucun mauvais titre, plus commercial que les précédents mais plus dur aussi. Et puis la harley, le cuir, les clous etc. apparaissent. Les vidéos sont bien funs aussi. Très plaisant à écouter. Putain la même année que Stained Class quand même. Belle pochette aussi. Et y a un côté fun et délire que j'aime dans ce disque.
Je le préfère de loin à British Steel. C'est un de ceux que je préfère écouter en fait.

Un album que j'ai toujours adoré. Trés hétérogène c'est sur, Evil fantasies est effectivement un peu faiblard et j'ai du mal avec Take on the world (je préfère United).

Mais tout le reste est excellent. J'adore Evening star, surtout les couplet, j'adore le pont sur Burnin'up, un des morceaux les plus sexuel du PRIEST, on sent qu'il était à fond dans son trip SM sur cet album.

Par contre, j'ai jamais compris pourquoi le groupe jouait aussi peu en live un morceau aussi génial que "Delivering the goods"??? Je l'ai toujours considéré comme un classique ultime, bon sang ce riff!! (il me rappelle un peu le dead men tell no tales de Motorhead).

Y a tellement d'excellents titres, parfois méconnus ou sousestimés qui sont ignorés...

Dommage que ce ne soit pas Maiden ou Manowar qui ait fait cet album

C'est vrai qu'il est bien de bout en bout celui là.
Pas comme Painkiller ou Defenders of the faith.
Oui je déconne. Mais il est bon quand même.

tant mieux sinon j'aurais un trou dans ma discotheque de MAIDEN

Reviens ici, petite chronique.

merci lapin, j'avais essayé une heure en vain moi